I. Introduction
La santé mentale est une préoccupation sociétale ancienne. L’évolution des réponses sociales et médicales a mené de l’exclusion à une prise en charge institutionnelle et légale. Ce cours vise à comprendre les bases législatives et les implications médico-légales pour les psychiatres.
II. Repères Historiques
| Période | Événements clés |
|---|---|
| Moyen Âge | Malades mentaux marginalisés, victimes de l’Inquisition. |
| 705-1270 | Premiers hôpitaux psychiatriques (Bagdad, Fès, Caire, Damas, Alep, Bethléem). |
| Révolution française | Philippe Pinel (1801) libère les malades, introduit le traitement moral. |
| 1838 | Loi française : création d’asiles départementaux, introduction du placement volontaire et d’office. |
III. Cadre Juridique et Principes
Texte de référence : Loi algérienne n°18-11 (2018) relative à la santé, encadrant les soins psychiatriques, l’hospitalisation, les droits du patient et les expertises médico-légales.
III.1. Objectifs du cadre légal
- Protection : Prévenir les atteintes à la dignité et aux libertés individuelles.
- Proportionnalité : Limiter les mesures privatives (soins sans consentement) au strict nécessaire.
- Traçabilité : Décisions motivées, avis médicaux circonstanciés, contrôles réguliers, voies de recours.
III.2. Principes directeurs en psychiatrie
- Consentement éclairé : Norme de soin.
- Soins sans consentement : Uniquement en cas de danger avéré ou trouble grave à l’ordre public, avec garanties procédurales.
- Confidentialité, respect du patient, continuité des soins, évaluation régulière.
IV. Hospitalisation Psychiatrique
Trois modalités d’hospitalisation :
1. Volontaire (Libre)
- Consentement du patient.
- Le patient peut demander sa sortie à tout moment, sauf danger immédiat (pour lui ou autrui).
- Respecte la liberté individuelle et le consentement éclairé.
2. À la demande d’un tiers (HDT)
- Patient refuse les soins mais présente un danger (pour lui-même ou autrui).
- Demande formulée par un proche/représentant légal, avec certificat médical circonstancié.
- Contrôle judiciaire/administratif possible.
3. D’office (HO)
- Décision administrative (wali) ou judiciaire.
- Danger grave pour l’ordre public ou la sécurité des personnes.
- Nécessite un avis médical et est soumise à un contrôle périodique pour prévenir les abus.
V. Les Expertises Psychiatriques
V.1. Cadre général
- Aide à la décision juridique (éclairage/avis technique).
- Ordonnée par une juridiction ou le parquet, avec mission écrite.
V.2. Principes
- Indépendance et impartialité de l’expert.
- Respect des droits (information, confidentialité, dignité).
- Méthodologie structurée : analyse clinique, historique, facteurs de risque/protection, tests, cohérence des données, conclusion motivée.
V.3. Rapport d’expertise
- Introduction (mission, sources, documents).
- Anamnèse et examen clinique (état mental, diagnostics différentiels).
- Analyse médico-légale (lien faits-troubles, responsabilité, dangerosité).
- Conclusions et réponses aux questions du magistrat, recommandations (soins, mesures de protection, suivi).
V.4. Expertises pénales
- Responsabilité pénale : Abolition/altération du discernement (art. 47 CP Algérien), capacité à être jugé.
- Dangerosité et risque de récidive : Mesures de soins ou de sûreté.
- Situations spécifiques : Garde à vue, détention (aptitude, besoins, risques suicidaires/agressifs), violences, délits sexuels, troubles psychotiques, addictions (évaluation impulsivité, contrôle, comorbidités).
V.5. Expertises civiles et sociales
- Capacité juridique : Curatelle/tutelle, gestion des biens, actes de la vie civile, consentement aux soins/actes patrimoniaux.
- Rente/invalidité et travail : Retentissement fonctionnel, adaptations, incapacités, inaptitude professionnelle.
- Affaires familiales : Autorité parentale, garde d’enfants, violence conjugale, risque et compétences parentales.
V.6. Expertises administratives et médico-sociales
- Fonction publique, militaire, sécurité : Aptitude au service, port d’armes, postes sensibles.
- Contentieux de la décision médicale : Révision de mesures d’hospitalisation (HO, HDT), contention/séclusion (recours commission santé mentale).
VI. Conclusion
La loi de 2018 priorise le consentement, n’autorisant les soins sans consentement qu’en cas de danger objectivé, avec des garanties strictes (motivation, avis médical, réévaluation, voies de recours). Les médecins doivent concilier clinique et juridique, documenter rigoureusement, et coopérer avec les autorités tout en préservant dignité et sécurité des patients.