I. INTRODUCTION & DÉFINITION
L’intérêt de cette question est clinique et thérapeutique. Les classifications actuelles appliquent la notion de troubles psychotiques aigus à des tableaux cliniques dominés par des symptômes psychotiques de courte durée. Ils sont distincts des psychoses schizophréniques et des délires chroniques.
I.1. Classifications
- DSM (Classification Américaine) :
- Troubles psychotiques brefs : durée 1 jour à 1 mois.
- Trouble schizophréniforme : durée > 1 mois et < 6 mois.
- CIM 11 : Troubles psychotiques aigus transitoires.
I.2. Exclusions
Cette description exclut les troubles psychotiques secondaires à une cause organique identifiable, tels que ceux induits par :
- Abus de substances toxiques ou sevrage.
- Troubles métaboliques.
- Maladies endocriniennes.
- Affections neurologiques.
- Maladies infectieuses ou parasitaires.
I.3. Caractéristiques & Évolution
Les troubles psychotiques aigus sont caractérisés par une éclosion soudaine d’un délire transitoire généralement polymorphe. Leur évolution soulève des débats :
- Guérison complète et définitive.
- Rémission suivie de rechute.
- Passage à la chronicité.
I.4. Définition (synthèse)
Les troubles psychotiques aigus sont définis par :
- Début brutal et soudain.
- Délire polymorphe, poly-thématique.
- Labilité de l’humeur.
- Note confusionnelle.
- Absence de symptôme physique.
- Résolution rapide de l’accès.
II. DIAGNOSTIC POSITIF (CLINIQUE)
II.1. Facteurs déclenchants
- Personnalité type anxio-phobique.
- Expérience de séparation.
- Circonstance de confrontation à autrui.
- Atteinte à l’éprouvé corporel.
- Événements datés.
- États de tension prolongés qui fragilisent le sujet.
II.2. Début
- Caractère brusque et subit (trait marquant).
- Plus fréquent chez les femmes (rapport 2:1).
- Pathologie de l’adulte jeune (20-35 ans), épisodes similaires à l’adolescence.
- Peut retrouver : inquiétude, changement humeur inhabituel. Toujours une rupture avec fonctionnement habituel.
- Délire d’emblée peut s’accompagner de troubles du comportement inauguraux (fugues, agressivité).
- Idées délirantes sans préparation, sans facteur déclenchant apparent, émergent en quelques jours/heures/instants (« coup de tonnerre dans un ciel serein »).
II.3. Phase d’état
II.3.1. Le délire
- Vécu, polymorphe, bouleverse l’être du patient. Thèmes : persécution, hypocondrie, ensorcellement, possession, grandeur (mégalomanie), revendication.
- Vécu comme expérience irrécusable, d’où intensité réactions affectives. Révélation innovante, conviction immédiate, adhésion absolue.
- Même si patient semble lucide, déstructuration conscience (hypnose, fascination par imagination). Patient spectateur et acteur, jouet et instigateur situation.
- Hallucinations fréquentes, interprétations, constructions imaginatives et intuitives, multiplication thèmes.
- Automatisme mental peut précéder délire et hallucinations (écho pensée, hallucinations psychiques). Phénomènes basaux et nucléaires, spécifiques formations xénopathiques.
- Thèmes et mécanismes se succèdent. Patient exprime déferlement prolixe propos délirants et agit son délire.
- Temps et espace sans référence à l’expérience commune.
II.3.2. L’angoisse
- Fréquente, accompagne souvent le trouble psychotique.
II.3.3. Autres signes
- Trouble de la vigilance : Orientation approximative, communication perturbée.
- Perturbation de l’humeur : Exaltation/euphorie ou tristesse/protestation. Humeur oscille et se lie à l’activité délirante.
III. DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
Se fait selon caractéristiques du début, durée épisode et symptomatologie dominante.
| Trouble | Distinctions |
|---|---|
| États confusionnels (délirium) | - |
| Poussée processuelle schizophrénie | - |
| Trouble thymique (ex: excitation maniaque) | Présence signes maniaques, thématique de grandeur du délire. |
| Troubles psychotiques secondaires à affection médicale | - |
| Troubles psychotiques induits par substance | - |
| Sevrage (troubles psychotiques brefs) | - |
| Démence | - |
| Trouble affectif avec caractéristiques psychotiques | - |
IV. ÉVOLUTION & PRONOSTIC
IV.1. Évolution à court terme
- Brièveté des bouffées délirantes (quelques jours à semaines) = règle.
- Fin d’épisode : modulation thymique de type dépressive possible.
- Sujet retrouve son efficience et niveau d’adaptation antérieurs.
IV.2. Évolution à long terme
- 40% guérissent définitivement.
- 45% : rémission immédiate, puis évolution périodique vers trouble bipolaire.
- 15% : évolution vers chronicisation schizophrénique.
IV.3. Pronostic
| Bon pronostic | Mauvais pronostic |
|---|---|
| Existence facteurs déclenchants | Présence personnalité pré-morbide schizoïde |
| Absence troubles personnalité pré-morbide | Début subaigu |
| Début brutal | Pauvreté symptomatologie |
| Symptomatologie expressive (bruyante) | Présence signes dissociation schizophrénique |
| Présence éléments thymiques | Faible composante anxieuse |
| Présence éléments confusionnels | Persistance activité délirante |
V. TRAITEMENT
Urgence psychiatrique +++. Choix traitement tributaire intuition clinique et expérience. Suivi minimal de 1 à 2 ans après rémission symptomatique (rechutes possibles).
V.1. Hospitalisation
- En cas de troubles du comportement ou conduites dommageables.
- En cas de refus du traitement.
V.2. Traitement chimique
- Refus traitement : Injectable les premiers jours.
- Neuroleptiques classiques incisifs : Halopéridol (5-15 mg/jour), Loxapine (25 mg). Adjonction benzodiazépine si nécessaire.
- Neuroleptiques classiques sédatifs : Lévomépromazine ou chlorpromazine (50-75 mg/jour).
- Après 1 semaine (voie orale) : Antipsychotique de seconde génération (moins effets secondaires).
- Olanzapine (10-15 mg/jour).
- Risperidone (4-8 mg/jour).
- Amisulpride (400-600 mg/jour).
- Aripiprazole (10-20 mg/jour).
- Durée traitement pharmacologique : 6 mois à 1 an. Réduction dose antipsychotique graduelle, surveillance résurgence symptomatique.
V.3. Électroconvulsivothérapie (ECT)
- Non réponse à au moins 3 types d’antipsychotiques de classe différente.
- Pronostic vital engagé.
- États catatoniques et stuporeux extrêmes.
V.4. Après l’urgence
- Psychoéducation : Information patient et proches sur maladie, objectifs traitement, effets secondaires, évolution pathologie.
- Psychothérapie de soutien.
- Évaluation fonctionnement prémorbide, relations d’objets, mécanismes défense, type personnalité, vulnérabilités associées, stresseurs psychosociaux.
- Apprendre stratégies de gestion du stress.
- Renforcement du moi.
VI. CONCLUSION
Malgré les avancées des classifications des psychoses aiguës et transitoires, une réorganisation des critères diagnostiques est essentielle pour homogénéiser les sujets souffrant de ce trouble. Ces sujets se démarquent par des caractéristiques épidémiologiques, cliniques et pronostiques spécifiques.